Mittal est un groupe néerlandais. Il est issu de la consolidation de nombreuses enteprises sidérurgiques dans le monde par
Mittal est un exemple réussi d’entreprise familiale indienne qui a grandi par acquisitions successives jusqu’à ravir la première place mondiale à Arcelor il y a deux ans. Certaines de ses acquisitions dans les pays de l’ex-bloc soviétique ont été rendues possibles par des financements de la BERD à hauteur de plusieurs centaines de millions d’euros. L’exemple du site de Termirtau au Kazakhstan est symbolique : racheté en 1995 par Mittal, il a été relancé grâce à un financement de la BERD et de
Arcelor a également ses success stories. Son passé est profondément lié aux débuts de la construction européenne par Robert Schuman et Jean Monnet, avec la signature en 1951 du traité instituant
Mais le passé d’Arcelor est également celui de la sidérurgie européenne, dont l’histoire récente est marquée par les crises et les restructurations industrielles. Arcelor est issu de Sacilor, dont la création en 1964 remonte au groupe familial Wendel et à Sollac, et d’Usinor, fusion de la Société des Forges et des acieries Denain et Anzin en 1948. Sous l’effet de la concurrence internationale, Usinor et Sacilor traversent à la fin des trente glorieuses une crise amplifiée par les deux chocs pétroliers. Elles sont nationalisés en 1981 pour être fusionnés en 1986, avant de subir une longue restructuration dont les régions concernées ne sont toujours pas complètement remises. Le résultat de la gestion par l’Etat de cette restructuration a été une évolution du secteur plus lente que dans les autres pays, avec au final une ardoise très lourde pour les contribuables, tout cela dans un contexte de considérations plus politiques qu’économiques.
Arcelor est créé en 2002 par la fusion d’Usinor avec Aceralia et Arbed. Il est le premier groupe mondial du secteur avec 5% de parts de marché, est coté en Bourse, et les Etats ne détiennent plus qu’une part très minoritaire de son capital (5% pour le Luxembourg). Après vingt ans de restructurations douloureuses, l’industrie sidérurgique européenne se croit enfin sortie du tunnel. C’est alors que s’engage une première bataille « Europe contre le reste du Monde », cette fois contre les Etats-Unis dont l’industrie sidérurgique en crise tente d’instaurer des barrières douanières protectionnistes avec le soutien de George W. Bush. Ces mesures déchaînent les réactions hostiles, jusqu’aux articles qui nous rappellent opportunément comment les ventes d’acier au régime nazi par le groupe Thyssen ont profité à la fortune des Bush. Mais ce n’est pas la morale, mais plus simplement l’OMC, qui aura finalement raison du protectionnisme américain en brandissant la menace de sanctions commerciales.
Ce résumé incomplet suffit à montrer à quel point Arcelor est un symbole : symbole de la construction de l’Europe et de son approvisionnement en acier à des fins industrielles et militaires, symbole de la politique active des Etats européens pour lutter contre la « désindustrialisation », et symbole d’un commerce mondial qui requiert une vigilance permanente pour que tous les pays – même le plus puissant – respectent les lois communes qu’ils se sont fixés. Cette histoire d’Arcelor permet sans doute de comprendre pourquoi nos hommes politiques de tout bord sont profondément hostiles à l’OPA de Mittal. Mais elle n’excuse pas leurs propos plus que désobligeants : « pas de projet industriel », « le fabricant de parfum contre le fabricant d’eau de Cologne », « l’OPA très inamicale ».
Le problème, c’est que Lakshmi Mittal vit à Londres, sa société est néerlandaise, et produit de l’acier partout dans le Monde. Dès lors, son OPA est un projet de consolidation européen et même mondial. Son projet industriel est de moderniser le secteur de la production d’acier, comme il l’a fait brillamment ces dernières années. Les produits de Mittal ne sont pas des sous-produits de mauvaise qualité fabriqués par des enfants dans des usines du tiers-monde. Ses clients sont des multinationales industrielles capables de choisir le meilleur fournisseur au meilleur endroit et au meilleur prix. Ses salariés sont soumis aux règles du droit du travail du lieu où ils travaillent, tout comme ceux d’Arcelor.
Alors pourquoi ne pas faire confiance aux actionnaires pour évaluer si la fusion des deux entreprises a un intérêt ? Nos hommes politiques ont-il une meilleure vision de ce qu’est un « bon projet industriel », exempte de toute arrière-pensée électorale ? Et les dirigeants d’Arcelor ont-ils à cœur la défense des intérêts des actionnaires de la société comme il se doit, sans considération pour leur propre carrière et celle de leurs amis issus du même corps d’ingénieurs ?
Les actionnaires d’Arcelor se demanderont évidemment si ils ont intérêt à devenir actionnaires du futur groupe Mittal-Arcelor, et pour cela ils vont analyser finement les détails de l’opération, examiner la couverture géographique des centres de production, les économies potentielles sur la R&D, les ventes et le marketing, la valorisations respectives de deux entreprises, etc. Ne les prenons pas pour plus bêtes qu’ils sont !
2 commentaires:
Je recommande de lire la note de l'Institut Montaigne sur le sujet du "patriotisme économique".
Quel patriotisme économique au XXIème siècle?
Trois mois plus tard les commentaires désobligeants vont toujours bon train, comme le souligne Olivier Bouba-Olga dans l'article suivant :
Mittal - Arcelor - Serverstal
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