10 décembre 2008

bonnes lectures du jour

Alexandre écrit :
Commentaire de GSF :

3. Gu Si Fang | mercredi 17 septembre 2008 | 19:17 

Chris Dillow prétend que la cause du problème est à chercher du côté de la propriété du capital et de la gouvernance. Il note que les hedge funds qui sont non cotés ont beaucoup moins de problèmes que les grands établissements cotés.
"So, one form of ownership has caused a crisis, and another hasn't".

Mais un ménage américain qui s'endette pour acheter une maison, c'est un peut comme une petite entreprise non cotée avec un seul "actionnaire". Pourtant, des millions d'entre eux se sont plantés.

Quant au problème principal-agent qu'il invoque, il n'existe pas que dans les banques. Pourquoi le management des grandes entreprises industrielles cotées n'a-t-il pas "spéculé avec l'argent des autres"? Parce que le problème vient du métier des banques, pas de la propriété du capital ni de la gouvernance. Dillow est complètement à côté de la plaque.

6. Gu Si Fang | jeudi 18 septembre 2008 | 06:12 

Tout l'argument de Chris Dillow est basé sur l'idée que les banquiers ont spéculé parce que leurs actionnaires ne contrôlaient pas assez l'utilisation du capital. Propriété # contrôle.

Un ménage qui s'endette pour acheter une maison prend un risque sur son propre patrimoine. Propriété = contrôle.

Cette différence de propriété et de contrôle a-t-elle un effet sur le comportement des gens comme le prétend Dillow? Non : les ménages ont fait la même erreur que les banquiers, à savoir emprunter trop pour investir dans l'immobilier, en anticipant qu'il ne pouvait pas baisser.

7. Gu Si Fang | jeudi 18 septembre 2008 | 06:42 

Pour essayer d'être plus clair, voici un passage où Dillow souligne le rôle des incitations :

"In hedge funds, things have been different. Very often hedge fund managers invest their own money and take key decisions themselves, or at least closely watch those who do. Their incentives to take huge risks have been smaller. So these have at least survived."

Un ménage aussi investit son propre argent. Ses incitations à être prudent son maximales.

Un PDG dans l'industrie investit l'argent de ses actionnaires. Il est incité à prendre des risques - d'autant plus qu'il détient des stock options qui peuvent monter mais pas baisser.

Un ménage a donc des incitations proches de celles d'un hedge fund, alors qu'un PDG dans l'industrie est plus proche d'un banquier. Si l'on raisonne comme Dillow, en expliquant la crise par ces incitations, les ménages devraient être prudents, et les industriels des têtes brûlées. Et pourtant les ménages se sont comportés comme les banquiers, et les industriels non...

Les incitations liées à la gouvernance ne semblent donc pas avoir joué un rôle déterminant.


Réponse de Alexandre Delaigue :

Vous prenez une vision maximaliste de l'argument pour y trouver une contradiction inexistante. Dillow ne dit pas qu'en l'absence de problème principal-agent, tout le monde agit prudemment : il dit qu'en son absence, les organisations concernées ont agi PLUS prudemment. Et vous aurez du mal à affirmer le contraire avec votre analogie avec un ménage : vous en connaissez beaucoup qui ont un effet de levier équivalent à celui des banques d'affaires qui se cassent la gueule, ou dont le patrimoine contient autant de saletés? Quelle est la dépréciation maximale que l'on peut constater sur un logement? Et au final, quelle est exactement la proportion de ménages qui auront fait n'importe quoi? Dans le cas des banques, c'est 100%, je vous le rappelle. Ajoutons qu'une "faillite" pour un ménage (surtout aux USA) n'a pas du tout les mêmes conséquences que pour une organisation, qui va disparaître en entraînant avec elle tous ses membres et ses actionnaires.

11. Gu Si Fang | vendredi 19 septembre 2008 | 08:11 

@ Alexandre

Le fonds de ma pensée c'est que je vois dans les évènements actuels l'exemple-type du cycle autrichien. C'est l'institution de la banque à réserves fractionnaires qui est la cause de la bulle, et donc de la crise qui s'ensuit. Légaliser cette pratique revient à légaliser une forme de vol. Les incitations qui en résultent sont trop puissantes pour espérer les contrer par de la réglementation ou de la gouvernance. Le dernier frein a sauté en août 1971, et depuis les crises s'enchaînent.

Les banques sont les premières à croquer la pomme : on leur impose un ratio capital/engagements. Elles sélectionnent les risques élevés : on introduit des critères de mesure du risque. Des pans nouveaux d'industrie financière se développent hors secteur réglementé pour capter une partie de la rente : ils seront réglementés à leur tour. Où s'arrêtera-t-on?

Je me posais il y a quelques mois la question suivante : "Qui perçoit le seigneuriage dans un système où 95% de la monnaie est créée par des banques privées, mais où leurs marges sont rognées par la concurrence?". En fait la question est mal posée. Il suffit de se demander : "A qui profite l'expansion de la masse monétaire, c'est-à-dire l'inflation?". Une foule de gens non identifiés sont avantagés par la redistribution qui en résulte, et tous ont une incitation à accroître leur part du gâteau. Et cela dépasse largement le cadre des métiers de la finance. Je ne vois pas comment tous les réglementer / contrôler.

Accessoirement, on ne peut pas faire un prêt sans emprunteur. Les ménages endettés sont donc partie prenante. La rente provenant du revenu monétaire est partagée entre l'émetteur du prêt et l'emprunteur.

Pour revenir à votre remarque sur l'analogie avec les ménages, le levier n'est pas le seul critère d'évaluation du risque. Un ménage avec un levier de 10 "parie" sur une seule maison, et sur au plus 2 salaires. Son risque peut être plus grand que pour une banque qui a un levier de 50 mais qui le répartit sur des milliers de contrats.

Chris Dillow s'égare en se focalisant sur la gouvernance. Et il insiste :

"Markets, then, can protect us from risks. So why haven't they done so? Again, the answer lies in a failure of ownership."

Je pense qu'on ne peut pas espérer contrôler tout le monde lorsque le vol est légalisé; et qu'il n'y a pas de mécanisme d'assurance possible contre le risque d'une surévaluation généralisée des actifs causée par l'expansion monétaire.

Les réactions sont les bienvenues!


Réponse de Alexandre Delaigue :

Sur cette question du problème de l'ownership, Surowiecki dans le dernier new yorker fait une remarque intéressante : toutes les banques d'affaires américaines sont devenues des sociétés cotées récemment. L'argument ne manque donc pas de valeur. Sur l'aspect autrichien de la crise, oui, up to a point quand même. Enfin, si vous voulez relancer la polémique banking principle-currency principle, bon courage. Mais si vous adoptez sur ce sujet la position de Fisher Black, la création monétaire n'a pas d'effet...

Aucun commentaire: