Intéressant article dans sur le site de The Economist au sujet de la récession au Japon et en Allemagne. Ces deux pays ont en commun d’avoir eu ces dernières années des taux d’épargne élevés et une consommation des ménages relativement faibles. Ce qui ne les empêchent pas d’être touchés aussi durement par la crise que d’autres pays comme le Royaume-Uni ou les Etats-Unis qui font pourtant état de comportements de consommation et d’épargne très différents.
Les cas japonais et allemand peuvent surprendre si l’on croit à l’idée qu’une crise (le bust) est toujours précédée d’une période d’euphorie (le boom) où la création monétaire excessive induit un “mal-investissement”, jusqu’au moment où le capital accumulé est dévalué. Ce genre de storytelling semble coller pour un pays comme les Etats-Unis : taux d’intérêt bas plus taux d’épargne négatif pour les ménages ne semblent pas soutenables à long terme. Mais ça ne marche pas pour le Japon et l’Allemagne. L’article de The Economist met le doigt sur autre chose pour expliquer la récession dans ces deux pays : le fait que les économies allemandes et japonaises ont énormément reposé ces dernières années sur leurs exportations. Elles ne souffrent pas d’une baisse de leur demande interne, ni du fait que les entreprises stoppent leurs investissements pour rembourser les crédits contractées précédemment, mais plutôt du ralentissement économique généralisé au niveau mondial.
Quelle est la morale de l’histoire ? D’abord qu’être cigale ou fourmi ne fait finalement pas grande différence, contrairement à ce que l’on pourrait croire. Certes, on peut penser qu’un pays comme l’Allemagne se remettra peut être un peu plus rapidement que les Etats-Unis. Mais, fondamentalement, l’intégration économique fait qu’il est extrêmement difficile pour une économie d’être isolé des chocs externes. L’autre aspect, c’est que la crise actuelle met en avant l’importance croissante prise par les déséquilibres financiers internationaux. Depuis 15 ans, les mouvements de capitaux mondiaux sont caractérisés par une tendance lourde : quelques pays (essentiellement les Etats-Unis) s’endettent et accueillent en masse les capitaux étrangers, tandis que les autres (les pays émergents mais aussi des pays européens) financent la consommation et l’investissement des premiers. Il est évident que cette tendance a été une cause structurelle de la crise : pour qu’une économie puisse financer ses dépenses de consommation et d’investissement par l’endettement de manière durable comme l’ont fait les Etats-Unis, c’est qu’il a fallut que des individus consentent à prêter leurs capitaux et y trouvent un intérêt. Avant la bulle de l’immobilier, il y en a eu peut être une autre.
Commentaire de GSF :
Je crois que vous passez complètement à côté. The Economist aussi, accessoirement, mais ce n’est pas étonnant, vu que le journaliste commence son article en citant la “hangover theory” de Krugman :-))
Prenons l’exemple de la Chine : taux d’épargne élevé et consommation intérieure faible, excédent commercial, peu ou pas de déficit budgétaire. Mmmh, en voilà un pays vertueux!The Economist devrait les citer en exemple, et dire que tout baigne, non? Seulement, la Chine a depuis des années une expansion monétaire considérable. La Chine a de plus connu, contrairement aux Etats-Unis, une hausse du niveau général des prix. Les conséquences ont été les mêmes qu’aux Etats-Unis : une bulle boursière et immobilière.
Ce qui distingue les Etats-Unis et la Chine, c’est la motivation politique de l’inflation. L’expansion monétaire des Etats-Unis a permis de financer des dépenses publiques importantes et improductives (no comment). Elle s’est produite dans un contexte de double déficit, ce qui est probablement facilité par le statut particulier du dollar. Je ne vois pas quelle autre monnaie aurait résisté si longtemps à un tel traitement.
L’expansion monétaire chinoise résulte d’une autre motivation, puisqu’il s’agit d’une politique mercantiliste basique. Le maintien du yuan à une parité stable et basse par rapport au dollar privilégie les industries exportatrices au détriment des consommateurs de biens importés. Les motivations étaient différentes, mais le résultat est le même : une expansion monétaire en Chine comme aux Etats-Unis, et donc des erreurs d’investissement. En Chine la bulle immobilière est en train d’éclater et des usines ferment. Quant aux Etats-Unis, no comment…
La “hangover theory” de Krugman est typiquement un argument d’homme de paille. Il tourne en dérision l’idée que la récession serait une purge salutaire après tous ces excès orgiaques; elle permettrait enfin le retour de la vertu. Les économistes qui croient cela ne peuvent être que des imbéciles. Sauf que c’est lui qui a inventé cette histoire. L’ABC ne raconte rien de tout cela. Dans l’ABC, c’est l’expansion monétaire qui est le facteur causal. Que l’Allemagne et le Japon aient été “vertueux” ou non est hors sujet : c’est l’expansion monétaire qui est la cause, et lorsqu’elle existe il y a des conséquences.
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